Dans cette interview accordée à Guinee7.com, le vice-président de l’UFDG, M. Bah Oury, parle de son exil, des militants de l’UFDG, de la gouvernance d’Alpha Condé, du congrès de l’UFDG, etc.
Guinee7.com : Comment vivez-vous, votre exil ?
M. Bah Oury : L’exil est une profonde déchirure pour tout être humain. Ce n’est pas facile de se voir ‘‘interdire’’ de rentrer chez soi. Mais cela est moins dur par rapport à ceux qui sont privés de leur liberté et qui croupissent injustement en prison. Je pense également à la douleur de celles et de ceux qui ont eu un des leurs tués ou handicapés à vie. Le prix à payer pour la liberté et la démocratie se révèle très élevé dans notre pays. Et hélas ! Jusqu’à présent tout est encore à faire.
Ne pensez-vous pas mener une guerre perdue d’avance contre Alpha Condé, dès lors que votre parti sur lequel vous devez compter ne vous suit pas ?
Je suis suivi par une large frange des militants de l’UFDG et c’est cela le plus important. Je suis également suivi par des citoyens guinéens qui se sentent proches des idées que je défends. En ce qui concerne Alpha Condé, la bataille continue, et il finira par la perdre. D’ailleurs il l’a déjà perdue. Il n’y a d’électricité dans la capitale malgré des centaines de millions de dollars engloutis. Les jeunes de la Guinée n’ont aperçu aucune perspective pour obtenir ni emploi, ni meilleure éducation et ni sécurité. Les femmes voient leur foyer s’appauvrir de jour en jour. La ville de Fria illustre à elle seule le grave fiasco de la gouvernance d’Alpha Condé. C’est pour cela que je lance l’appel à la mobilisation sociale et citoyenne pour le changement ici et maintenant !
Que va être votre commentaire si on vous comparait à un Général sans troupe ?
Je ne représente rien à moi seul. Pourquoi s’acharner sur un Général sans troupe en l’accusant d’avoir commandité ‘‘l’affaire du 19 juillet 2011’’ ? Pourquoi des ‘‘pseudos-amis politiques’’ cherchent à marginaliser les personnes qui défendent mes idées ? Donc cela voudrait dire que mes idées sont porteuses d’espoir et de perspectives heureuses pour notre pays. C’est cela qui fait peur, car Bah Oury est porteur d’un projet de changement démocratique et de construction nationale. Si vous ne représentez pas quelque chose, personne ne s’intéresse à vous. Bah Oury, qu’on l’aime ou qu’on le déteste est écouté par ses concitoyens.
Vous comptez briguer la présidence de l’UFDG au prochain congrès, n’avez-vous pas peur d’un Waterloo politique dès lors que votre challenger, El Hadj Cellou est très populaire au sein de votre parti ?
Dès lors que j’ai marqué ma forte défiance vis-à-vis de l’orientation politique suivie par Cellou Dalein Diallo, il est tout à fait normal dans un espace démocratique de présenter une alternative crédible. Je travaille dans ce sens. Toutefois pour qu’il y ait un congrès serein et dont les délibérations sont susceptibles d’être incontestables des préalables sont nécessaires. C’est pour discuter de ses préalables que j’ai marqué mon accord au doyen, El hadj Saïkou Yaya Barry d’organiser le cadre de discussion qui permettra à Cellou Dalein et à moi-même d’aborder les problèmes du parti afin de dégager une feuille de route consensuelle pour la préparation du congrès.
En effet depuis trois ans, la gouvernance du parti est en proie à une gestion clanique. Les personnes qui me sont proches sont marginalisées et reléguées pour ‘‘moins que rien’’. Les structures du parti sont à géométrie variable au gré d’une volonté de se constituer artificiellement une majorité mécanique. Ces turpitudes ne passeront pas au niveau de l’UFDG.
Vous savez, la bataille de Waterloo qui fut le dernier combat de Napoléon est surtout la victoire d’une vision stratégique réaliste et méthodique au détriment d’une tactique faite d’improvisations et de manque de cohérence. Quand une bataille est engagée, le stratège ne doit négliger aucun des paramètres en présence et ne jamais sous-estimer l’adversaire. Je m’efforce de retenir cette leçon.
Sa récente tournée avec une mobilisation de foule au Foutah, vous effraie ?
Je suis heureux que les militants de l’UFDG restent toujours mobilisés.
Vous semblez clouer au pilori, tous ceux qui discutent avec Alpha Condé, dans cette posture ne pensez-vous pas être moins démocrate que ceux qui acceptent le compromis, le dialogue, des valeurs de la démocratie ?
Lorsque les fondements de la République ne sont plus respectés notamment l’autorité de la loi par ceux-là même qui sont sensés y veiller alors le pays est en danger. C’est le cas avec Alpha Condé. Son bilan en trois ans est éloquent. Violations systématiques des droits de l’homme, développement du narcotrafic, insécurité généralisée, aggravation de la pauvreté et détournements des deniers publics sont les réalités incontestables de la gouvernance d’Alpha Condé. Est-ce acceptable pour un pays qui a connu les massacres du 22 janvier 2007 et du 28 septembre 2009. Je dis non. Je préfère être du côté de la majorité de la population qui subit une oppression sociale et politique. La poursuite de cette politique mènera fatalement notre pays à de graves déchirures. C’est pour cela que je résiste pour changer le cours du destin de la Guinée si Dieu m’en donne la force et la sagesse.
Dalein a déclaré sur France 24 qu’en créant l’opposition extra-parlementaire vous vous êtes exclu de l’UFDG, quel est votre commentaire ?
Cette déclaration a été condamnée tant en Guinée qu’à l’étranger et n’engage que la personne qui l’a faite. Bah Oury reste et demeure membre de l’UFDG et l’UFDG est une et indivisible. La question d’aujourd’hui est celle concernant ‘‘la gouvernance du parti par Cellou Dalein Diallo’’.
Interview réalisée via le mail par
Ibrahima S. Traoré